It matters not what someone is born, but what they grow to be.
«
Harwood est mort. » La nouvelle avait déjà circulé dans la famille depuis un moment déjà, une nouvelle tragique qui ne semblait qu’à peine atteindre Daario. L’un de ses frères venait de mourir et il semblait n’en avoir cure. Le sorcier était encore focalisé sur la mort de son épouse quelques mois plus tôt, une tragédie dont il semblait incapable de se remettre. A Poudlard déjà, il avait su qu’on le marierait sans lui demander son avis, il s’était fait à cette idée et l’avait acceptée. Il n’avait pas cherché à aller à l’encontre des volontés de ses parents, alors il s’était marié, quelques semaines à peine après avoir terminé sa dernière année à Poudlard. Joanna Selwyn était une femme incroyable, il l’avait déjà croisée plusieurs fois dans les couloirs de Poudlard, mais il avait appris à la connaitre dans ce mariage qu’on leur avait imposé à tous les deux. Un mariage qui aurait pu être compliqué vu les circonstances, mais il avait fallu peu de temps au jeune homme qu’il avait été pour tomber éperdument amoureux de la belle Joanna. Mariés depuis vingt-cinq ans, ils se connaissaient par cœur et ils s’aimaient d’un amour sincère. Elle était morte à présent et Daario avait du mal à imaginer ce que pouvait être la vie sans elle. Elle était un pilier dans son univers, une présence réconfortante dont il semblait incapable de se passer. Toutes ses pensées allaient à cette épouse qu’il venait de perdre et son frère passait bien après elle. La sorcière avait perdu la vie en mettant leur deuxième enfant au monde. Après la naissance de leur fille aînée, le couple avait essayé d’avoir un autre enfant à plusieurs reprise, mais il avait fallu attendre une bonne vingtaine d’année pour qu’elle tombe de nouveau enceinte. Ça avait été une grossesse difficile à laquelle elle n’avait pas survécu. Il avait un fils à présent, un nourrisson dont il peinait à s’occuper, complètement perdu sans son épouse à ses côtés. Le regard dans le vide, il n’écoutait qu’à peine se que racontait ses parents, tout ce qu’ils semblaient retenir, c’était que la mort de leur fils allait poser problème pour leur alliance avec les Malefoy. Ils avaient besoin de cette alliance pour s’en sortir maintenant que la guerre était finie et qu’ils n’étaient pas franchement dans le camp des vainqueurs. Les Malefoy non plus sans doute, mais ils étaient respectés. Enfin, au final la fin de cette alliance semblait plus les peiner que la mort de leur enfant. Daario ne devrait sans doute pas être surpris d’une telle réaction, il les connaissait tellement bien après tout. «
Daario pourrait prendre la place de son frère. » L’évocation de son prénom le fit sortir de ses songes, il releva immédiatement le regard vers son père. C’était quoi ce plan encore ? C’était d’un mariage dont on parlait, pas d’un match de quidditch ; il ne pouvait définitivement pas remplacer son frère. «
Pardon ? » Confus, il n’arriva pas à prononcer un mot de plus. Harwood avait aimé sa fiancée, dès la minute où il avait croisé le regard de Jane Malefoy, il avait commencé à ne jurer plus que par elle. Il ne pouvait pas épouser sa fiancée, il ne pouvait pas épouser quelqu’un d’autre, il venait tout juste de perdre sa femme. «
Tu dois épouser Jane. » C’était hors de question. Qu’est-ce qu’ils pensaient pouvoir encore lui imposer ? Il avait quarante-trois ans aujourd’hui, pas dix-sept. Il avait construit sa vie, il ne dépendait plus de ses parents, il n’avait plus à répondre à chacune de leurs volontés. «
Non, je ne peux pas faire ça. » Il pouvait trouver des milliers d’arguments pour appuyer ses propos, mais le regard accusateur de son père sembla le retenir. Il hésita un court instant, avant de reprendre. «
Jane n’a pas encore trente ans, elle est trop jeune. » Elle n’avait certainement pas envie de passer le restant de ses jours avec un type qui avait pas loin de vingt ans de plus qu’elle, mais évidemment, personne n’avait l’intention de demander l’avis de la jeune femme. «
Oui, elle est encore jeune. Elle peut avoir des enfants. » L’argument suprême de sa mère, à croire qu’elle n’aurait jamais assez de petits enfants. Lui, il avait une fille et un fils, ça lui semblait déjà assez. «
J’ai déjà deux enfants, si vous avez besoin d’un héritage plus grand, demandez aux autres. » Il avait encore un frère et une sœur, à eux de jouer leur rôle dans l’héritage de la famille, lui il avait fait sa part, il ne voulait pas d’une nouvelle épouse. «
Sinon, peut-être que Maysilee pourrait épouser le cadet des Malefoy. » D’un coup, le sorcier senti une vive colère s’emparer de son être. Ses parents avaient toujours fait comme pour leur semblait avec la vie de leurs enfant, mais il était hors de question qu’ils imposent quoi que ce soit à sa fille. «
A son âge, il serait tant de lui trouver un époux. » C’est un regard noir qu’il posa sur ses parents, lui vivant, ils ne toucheraient pas à un cheveu de sa fille. «
Si j’épouse Jane, je veux qu’on laisse mes enfants en dehors de vos histoires d’alliances. » Il voulait laisser à ses enfants la liberté de faire ce qu’ils voulaient de leur vie et si Maysilee lui annonçait qu’elle voulait épouser un né moldu, qu’elle le fasse, il ne s’y opposerait pas et ne laisserait personne décidé pour elle. Un soupire passa les lèvres de son père. «
Très bien. » Le deal était scellé, il allait épouser Jane Malefoy.
D’un geste rapide, Daario avala le contenu de son verre comme pour se redonner du courage. Dans quelques instants, il allait épouser Jane Malefoy, une femme dont il ne savait rien et qu’on lui imposait, trop peu de temps après son veuvage. Il n’avait pas envie d’être de nouveau marié, il ne pensait pas être capable d’aimer à nouveau, alors à quoi allait ressemblait ce mariage ? Il avait presque vingt ans de plus qu’elle, elle n’avait que quelques années de plus que sa fille. C’était étrange. Un verre ne suffirait sans doute pas à lui faire avaler la pilule, mais il ne pouvait pas être bourré à son mariage, on attendait mieux de lui. Des coups portés contre la porte le tirèrent de ses rêveries. Il ouvrit la porte et reconnu rapidement la longue chevelure rousse de sa fille. «
Est-ce que ça va ? » La jeune femme s’était glissée dans la chambre, refermant soigneusement la porte derrière pour faire taire les bruits venant du rez-de-chaussée, là où les invités étaient déjà en train de célébrer le mariage à venir. Après un haussement d’épaules, Daario s’assit sur le bord du lit et la jeune fille vint rapidement prendre place à ses côtés. «
Ouais ça va, ne t'inquiètes pas. » Une réponse qui avait le goût d’un doux mensonge qu’il se répétait à lui-même pour essayer de s’en convaincre, mais Maysilee n’était pas dupe, elle connaissait suffisamment son père pour savoir qu’il n’allait pas bien et elle comprenait. Elle avait perdu sa mère quelques mois plus tôt, il avait perdu son épouse et on lui imposait déjà un nouveau mariage. «
Je suis désolée. » Il déposa son regard sur elle, un léger soupire sur les lèvres, elle était bien la dernière personne au monde à avoir besoin de s’excuser. «
Est-ce qu’ils vont aussi décider de qui je devrais épouser ? » Cette question, elle l’avait eu en tête des millions de fois au cours de sa vie, mais elle ne l’avait jamais formulée à voix haute. Maysilee n’était pas stupide, elle savait comment les choses fonctionnaient dans la famille Rosier. «
Non. Si on part de leur principe, c’est au père de choisir et j’ai choisi que personne d’autre que toi ne te choisira un mari. » Il attrapa fermement sa main dans la sienne, lui vivant, personne n’imposerait quoi que ce soit à ses enfants. Maysilee était libre de choisir comment elle voulait vivre sa vie et avec qui elle voulait la vivre. S’il épousait Jane aujourd’hui, c’était pour éviter qu’on se serve de sa fille pour sceller des alliances bidon. «
Merci. » Il lui adressa un léger sourire avant de déposer un baiser sur son front, il ne laisserait rien arriver à sa fille, elle pouvait en être certaine. «
Tu devrais descendre, ils t’attendent. » Il savait qu’il se faisait attendre, mais il n’avait clairement pas envie de se marier aujourd’hui. Son regard se posa sur son annulaire gauche, encore orné de l’alliance de son premier mariage, cette vision lui arracha un soupire, il devait s’en débarrasser avant de descendre. Ce fut sa fille qui attrapa sa main pour retirer l’anneau à son doigt. Elle retira ensuite l’une des chaines à son cou, en fit tomber le pendentif pour le remplacer par l’alliance avant de venir l’attacher autour du coup de son père. «
Voilà, comme ça tu pourras continuer à l’avoir sur toi. » Il lui adressa un nouveau soupire avant de se lever du lit pour remettre correctement le col de sa chemise et cacher l’alliance sous le tissu. La jeune femme se leva également afin de l’aider à attacher son nœud papillon. «
Qu’est-ce que tu ferais sans moi ? » Un léger rire s’extirpa de la gorge de la rouquine avant qu’elle ne se glisse dans les bras de son père. «
Pas grand-chose. » Il étreignit quelques instants sa fille dans ses bras, avant de finalement, descendre en sa compagnie pour affronter ce fichu mariage qu’on lui imposait.
Un soupire passa les lèvres du sorcier, alors qu’un bruit dans l’escalier semblait indiquer que quelqu’un venait de descendre. Quelqu’un qu’il imaginait facilement être Jane, elle vivait avec lui depuis leur mariage et il savait déjà que ce n’était pas son fils de huit mois qui venait de descendre les escaliers, ni sa fille puisqu’elle n’était pas là ce soir. Ça ne pouvait être que Jane. Ils avaient beau être mariés depuis quelques mois, l’idée de rester dans la même pièce qu’elle l’embarrassait. Il l’évitait soigneusement, elle et toutes les responsabilités qu’il avait dans cette maison. Il s’en voulait, parce qu’il savait que son fils avait besoin de lui et qu’il n’était pas assez présent pour lui. Il savait qu’il devrait être moins distant avec sa fille, tout comme il savait que son comportement avec Jane était inacceptable. Mais la situation
était compliquée et c’était une excuse facile qu’il se servait à lui-même dans l’espoir vain de rendre les choses plus acceptables. Il avait perdu sa femme et sans elle, c’était son monde tout entier qui s’écroulait. Il avait perdu ses repères. Il avait l’impression de trahir la mémoire de sa défunte épouse en construisant quelque chose avec Jane, le simple fait de l’accepter en tant qu’épouse semblait représenter à ses yeux une trahison. C’était également la mémoire de son frère qu’il bafouait, il avait aimé Jane, il s’était réjouit de son mariage à venir avec la jeune Malefoy et maintenant qu’il était mort, son frère aîné lui volait son épouse. Certes, il n’avait rien volé, on avait décidé pour lui. Ses parents se plaisaient à penser qu’ils lui avaient laissé le choix, lui, il ne voyait pas les choses de la même façon. Ils avaient mis sa fille dans la balance, il avait été obligé d’accepter pour ne pas qu’on décide de marier sa fille avec un illustre inconnu. Il valait mieux que ce soit lui plutôt qu’elle. Ce n’était peut-être pas mieux pour Jane. Si on avait forcé sa fille à épouser un Malefoy, il en aurait été gagnant, sa fille était parfaite. Jane elle, elle avait clairement perdu au change. Elle s’était vue troquer un homme qui l’aimait conte un homme qui semblait n’en avoir que faire d’elle. Ce n’était pas le cas. Il la voyait, il l’écoutait, mais il n’arrivait pas à se montrer impliqué.
C’était compliqué. C’était tout ce qu’il pouvait dire. «
Il est tard, tu devrais peut-être venir te coucher. » Elle avait raison, passer la soirée à fixer le feu dans l’âtre de la cheminée ça n’avait rien de constructif, il travaillait demain, il ferait mieux d’aller se coucher, mais depuis qu’il partageait son lit avec Jane, il avait tendance à passer très peu de temps dedans. C’était gênant, bizarre même. Depuis vingt-cinq ans, il dormait aux côtés de Joanna et maintenant, c’était une autre femme qui dormait à ses côtés. Il ne pouvait pas oublier ces vingt-cinq années aussi facilement qu’on le lui demandait. «
J’arrive, je … » Il quoi ? Il regardait le feu dans la cheminée, ce n’était pas comme s’il s’agissait de l’occupation du siècle. Il laissa échapper un soupire sans pour autant détourner le regard. «
Je ne sais même pas ce que je fais. » C’était à se demander s’il parlait de l’instant présent ou plus généralement. Il était clair que depuis la mort de sa femme, il ne savait plus ce qu’il faisait, il enchainé les erreurs et les gens autour de lui en payaient les conséquences. «
Est-ce que ça va ? » Très bonne question. Toute une partie de lui avait envie de répondre que non, ça n’allait pas, mais il n’avait pas envie de s’étendre sur ses problèmes, pleurer sur sa défunte épouse en compagnie de Jane. Alors, il se leva de son fauteuil avant d’adresser un léger sourire à sa conjointe. «
Oui, désolé. Allons-nous coucher. » Sur ces mots, il avança vers les escaliers, prêt à aller se glisser dans son lit en compagnie de Jane, une autre nuit qui ressemblerait aux autres, ils allaient dormir chacun de leur côté du lit en se tournant le dos. On l’avait marié pour qu’il ait des enfants avec elle, c’était mal parti de toute évidence, mais
c’était aussi extrêmement compliqué.
«
Qu’est-ce qui ne va pas chez toi ? » Les bras croisés sur la poitrine, Melisandre leva les yeux au ciel de façon complètement exagérée. Face à elle son aîné se contenta de hausser les épaules, geste qui agaça d’avantage la sorcière. «
Tu dois te ressaisir. Tu ne peux pas laisser tomber tes enfants et du dois faire des efforts avec Jane. » Il laissa échapper un léger soupire, plus il écoutait sa sœur, plus il avait l’impression d’être confronté à un disque rayé, répétant sans arrêt les mêmes phrases. Elle avait raison, il ne cherchait pas à nier la véracité de ses propos. Il n’avait jamais douté de ce que pouvait dire sa cadette. Melisandre était la seule fille de la fratrie, Daario avait souvent ressenti le besoin de la protéger, de la défendre en toute circonstance, notamment contre leur frère, Harwood qui n’avait de cesse de s’en prendre à sa sœur – d’après Melisandre en tous cas. Ils étaient proches, malgré les onze années qui les séparaient. Il avait toujours été de son côté, il avait maudit son mari avec elle et il se réjouissait à ses côtés qu’ils soient en train de pourrir à ses côtés. Pendant longtemps, ils n’avaient au aucun secret l’un pour l’autre, ils se faisaient confiance. Aujourd’hui, elle ne lui disait pas tout, l’ordre du phénix, la mort d’Harwood, elle était incapable d’en parler ; mais pour lui dire ce qu’elle pensait de son récent comportement, elle ne se gênait pas. Sa femme était morte. C’était difficile, elle voulait bien l’admettre, elle-même, elle avait adoré sa belle sœur, elle avait admiré leur mariage qui lui semblait être parfait, elle avait espéré connaitre la même chose que lui, puis, elle avait été mariée. Elle avait détesté son époux, envié Joanna Selwyn pour avoir eu la chance d’épouser un type comme son frère. Mais elle était morte et ça ne voulait pas dire que la vie s’arrêtait. Il avait une fille, déjà bien grande, mais qui avait besoin d’un père, il avait un bébé de quelques mois (Joanna étant morte en couche, cet enfant était tout ce qu’elle laissait derrière elle) qui ne pouvait pas se passer de la présence de son père. Il y avait Jane, sa nouvelle épouse qui n’avait, de toute évidence, pas choisi de partager sa vie. Elle aurait dû épouser Harwood, mais il était mort alors, pour faire perdurer l’alliance avec la famille Malefoy, on l’avait mariée à Daario, veuf depuis peu de temps. C’était un peu de sa faute s’ils se retrouvaient dans cette situation, elle voulait aider, arranger les choses. La situation était difficile pour lui, mais il devait également comprendre qu’elle l’était également pour son épouse et ça, Melisandre était bien placée pour le savoir. «
Aucune femme ne mérite d’être traitée comme si elle n’était rien. Jane n’est pas celle qui a choisie que vous alliez vous marier. Je sais, tu viens de perdre Joanna et c’est terrible, mais Jane n’y est pour rien. Crois-moi, être coincé dans un mariage où on a l’impression d’avoir autant d’importance qu’une plante verte, c’est l’enfer. » Il avait détesté son beau-frère pour ce qu’il avait fait subir à sa sœur et il se comportait de la même façon avec Jane, il savait que son comportement été inexcusable, il savait que sa sœur avait raison, mais les efforts étaient dur à faire. «
Je sais, mais c’est … » Elle ne lui laissa pas le temps de finir sa phrase, elle en connaissait déjà la suite, alors elle jugea bon de lui couper la parole. «
Compliqué ? Tu réponds toujours ça. Tu radotes, fais gaffe, c’est un signe de vieillesse. » Elle lui adressa un sourire avant de lui donner une petite tape sur l’épaule. «
Fais des efforts, s’il te plait. » Il acquiesça. Elle savait qu’il essaierait, mais elle n’était pas sûre qu’il réussisse, tant, pis, ça lui donnerait une bonne raison de lui faire une nouvelle fois la morale, elle n’avait pas l’intention de baisser les bras.